Chronique olympique - première édition

Publié le par Xiao Zhu

En ce deuxième jour de ciel bleu consécutif (chose ô combien rare à Pékin l’été) et de températures revenues à des niveaux plus raisonnables, votre correspondante permanente toute désignée que je suis reviens vous donner quelques nouvelles du front olympique pékinois, pour vous faire vivre les JO de l’intérieur (encore mieux que TF1 ou France 2 réunis !).

Nous en sommes déjà à la deuxième semaine olympique et en ce moment l’événement qui passionne les foules, en dehors du nombre hallucinant de médailles d’or gagnées par la Chine, c’est le forfait du grand champion chinois du 110 m haie, Liu Xiang. Depuis deux jours Liu Xiang, blessé, est pleuré par la Chine toute entière mais aussi et surtout par les vendeurs à la sauvette de billets qui se lamentent de l’absence de ce héros national qui aurait faire vibrer le Nid d’oiseau jeudi soir et fait flamber les prix des billets au marché noir…

La première semaine est passée à toute vitesse et tout le monde est presque étonné de constater que tout se soit si bien déroulé, si facilement. En réalité, alors que nous nous attendions à vivre l’enfer (enfin moi en tout cas, puisque j’imaginais les JO comme deux semaines d’horreur carcérale, où nous serions quotidiennement menacés d’attentats par des extrémistes tibétano-ouighours sanguinaires, battus à chaque coin de rue par des CRS chinois écumant de rage xénophobe/anti-française, étouffés par un ciel de plomb et un air irrespirable, mourrant d’ennui enfermés chez nous sur ordre du gouvernement… bref, vous avez compris quelque chose d’assez éloigné du paradis terrestre), les JO n’ont absolument pas bouleversé notre quotidien. Bien au contraire, ils l’ont parfois amélioré en nous permettant de respirer mieux, de prendre le métro sans peine, de ne pas être pris chaque jour dans des embouteillages monstres, et en nous donnant une bonne excuse pour en faire le moins possible au travail en prétextant auprès de nos interlocuteurs français que « Oh, vous savez en ce moment avec les JO c’est la folie », et à nos interlocuteurs chinois que « Oh, vous savez je soutiens tellement les Jeux que je n’ai plus le temps de travailler car je passe mes après-midi au stade à encourager les athlètes chinois » (non, j'avoue celle là je ne l'ai pas encore sortie)... Je continue donc à vivre ma petite vie chinoise très paisiblement, sors, fais mes courses chez Carrefour-Jialefu, vais contempler les lotus en fleurs le samedi après-midi, sillonne la ville avec mon vélo tout rouillé… Vous allez vraiment croire que les Chinois m’ont totalement lavé le cerveau mais je vous assure que mes seuls bémols ont trait à l’absence temporaire des petites terrasses crados près de mon travail où j’étais si heureuse de pouvoir aller déjeuner au soleil et à la fermeture de ma boutique de DVD pirates (je sais, c’est mal !) mais tout cela refleurira certainement très vite après les JO donc je ne m’inquiète pas vraiment.

Il y a bien eu le triste assassinat d’un proche d’un entraîneur de l’équipe américaine de volley-ball qui a endeuillé le début de la semaine dernière mais cela était vraisemblablement l’acte isolé d’un déséquilibré, qui aurait pu arriver n’importe où et n’importe quand et sans absolument aucun lien avec les Jeux.

L’ambiance est donc finalement assez sympathique, pas la folie furieuse mais bon enfant. Je rentre le soir du travail aux côtés de supporters très calmes se rendant au Stade des travailleurs (juste à côté de mon bureau, ce soir Brésil-Argentine, beau spectacle en perspective), on se passionne tous pour le nombre de médailles gagnées par nos pays respectifs, on garde un œil sur la télévision ou Internet, on vibre aux exploits d’Alain Bernard (si, si, on a fait une mini ola à deux dans le bureau quand il a eu l’or)… On s’exaspère aussi secrètement que la Chine gagne tout mais les Chinois sont des supporters assez sympathiques et on a du mal à leur en vouloir.

Mais rentrons dans le vif du sujet, le sport. Et bien figurez vous que mes mondanités n’ont pas été vaines puisque je me suis vue offrir par la délégation belge de la dernière fois (voir mon dernier post) une place de première catégorie pour l’épreuve du plongeon synchronisé hommes 3 mètres. J’étais assez curieuse parce que 1- ça avait lieu dans le Cube d’eau, 2- c’est l’une des disciplines reines des Chinois donc ambiance garantie et 3- n’étant pas une grande fan de compétition sportive, celle-ci avait le mérite de ne pas durer longtemps, d’être plus esthétique que sportive et de tenir davantage du défilé de top models en maillots de bain qu’autre chose. Un vrai truc de filles quoi !

Mercredi dernier je suis donc partie (en métro flambant neuf, gratuit pour les détenteurs de billet olympique) pour le parc olympique. Le parc olympique est un espace gigantesque, réservé aux personnes ayant des billets, où se trouvent la plupart des installations, dont le fameux Nid d’oiseau, le Cube d’eau, mais aussi le Gymnase national ou encore le Centre des médias - en photo ci-contre - (vous savez, là où la presse du monde entier a découvert avec étonnement qu’elle n’aurait pas avoir accès au site d’Amnesty International… bienvenus dans une dictature les amis !). En fait ce parc immense est surtout un Disneyland géant consacré aux marques sponsors de ces Jeux. L’endroit est grand, impressionnant et tient plutôt du parc d’attraction en version un peu ennuyeuse, les seules attractions étant la « maison Coca-Cola » (40 minutes de queue pour une déambulation à travers l’histoire de la bouteille à bulle, bof), la « maison Adidas » ou encore des maisons aussi excitantes que le « pavillon Assurance de Chine » ou de « Bank of China ». Côté restauration là aussi c’est un peu surprenant puisqu’à part des stands chinois servant du riz en barquette surgelé peu ragoûtant, un seul et unique restaurant (à ma connaissance) : Mac Donald’s. Mac Donald’s qui soit dit en passant doit faire une fortune pendant ces JO avec tous les supporters étrangers dépités par la nourriture chinoise (non pas qu’elle ne soit pas bonne mais difficile de choisir quand on ne lit ni ne parle le chinois). Pas mal de monde, à ma surprise beaucoup de Chinois, souvent assez modestes, (ce qui montre bien que ces Jeux ne sont pas réservés à une élite d’étrangers fortunés, plutôt positif non ?) et toute une armée de volontaires en tenue bleue et de gens à badges.


Le parc olympique (merci Coca-Cola...)

Petite parenthèse (je sais ce post commence à être sacrément long…) : depuis mon retour, Pékin est devenu l’habitat naturel de deux nouvelles espèces, le badgé et le volontaire.

Le badgé se promène fièrement jour et nuit (je le suspecte de dormir avec) avec son accréditation jaune estampillée BOCOG (Comité d’organisation des JO de Pékin). En ces temps olympiques, le badge est devenu la meilleure façon de montrer à quel point on est « in », important, différent du commun des mortels. Le badge doit être jaune et énorme, mais dans une ville où le mot d’ordre est devenu « Je suis badgé donc je suis », on se contente, à défaut, d’autres badges de catégories subalternes. Et là tout est bon à arborer, pourvu que ça soit suffisamment gros pour être vu se balançant autour de notre cou, que ce soit un badge « Club France », « Amicale du Quartier de Chaoyang », « Volontaire SPA de Fribourg », j’en passe et des meilleurs. A Pékin pour exister, il faut désormais être badgé.

L’autre animal étrange récemment apparu à Pékin est le volontaire. Tout de bleu et de blanc vêtu, la banane jaune autour de la taille et le fameux badge autour du cou, le volontaire est officiellement là pour aider au bon déroulement des JO et aider les hôtes chinois et surtout étrangers à traverser sans encombre la période olympique. Ca c’est la version officielle. Moi avec mon esprit mal tourné, je ne peux m’empêcher de penser que ce jeune volontaire en bleu est un peu le nouveau garde rouge version 2008. Sourire niais H24, il défile nuit et jour dans Pékin, se voit respecter, admirer et c’est tout juste si on ne lui cède pas la place dans le bus comme à la grande époque. L’idéologie ayant cédé la place aux bons sentiments politiquement corrects, on retrouve, à la place du Livre Rouge, le carnet des phrases amicales à répéter aux étrangers (du genre « Welcome to Beijing », « célébrons ensemble l’amitié entre les peuples du monde » et « aimez-vous les mascottes olympiques ?»….) et à la place de l’étoile rouge sur le cœur, les anneaux olympiques. On a changé de style mais l’esprit demeure… Heureusement que la Chine peut, comme toujours, compter sur sa jeunesse docile.


La panoplie du parfait volontaire (merci Adidas...) et remarquez le badge jaune !

Fin de la parenthèse, revenons plutôt à ma journée olympique. Donc après une frite-coca au Mac Donald’s olympique pris d’assaut par une foule de supporters en manque de burgers et un bref tour dans la maison Adidas, nous voila partis pour le Cube d’eau. Il est sans doute moins beau de jour que de nuit (lorsque je l’avais vu pour la première fois) mais reste assez fascinant. Et lorsqu’on y entre, c’est pour découvrir des murs d’eau ruisselant sur les parois et des effets de transparence assez réussis : on se croirait vraiment dans une grande bulle. Au milieu, la piscine olympique fait presque petite tant le lieu est grand.

Le Cube d'eau, de jour

Nous nous installons à nos supers places (au rang de la presse) alors que les champions arrivent déjà en peignoir. Les épreuves commencent. En lice, la Chine bien sûr, deux anciennes puissances soviétiques (Russie, Ukraine), les Américains, les Allemands, les Canadiens et les Britanniques. Le plongeon serait-il un sport de grande puissance ? En tout cas pas de petit pays et pas de plongeur français. Les Britanniques ouvrent le bal. Je n’avais encore jamais vu de compétition de plongeon et je suis ébahie. Tant de précision ! Et encore, nous n’en sommes qu’aux figures simples. J’apprends que plusieurs critères sont pris en compte dont l’eau projetée autour de l’impact du plongeur. Pendant une heures, les plongeurs enchaînent figures, vrilles et… douches. Un plongeon, une douche, un plongeon. Une heure plus tard les Chinois sont bien évidemment les grands vainqueurs, à la grande joie de la foule, majoritairement chinoise, qui s’époumone « zhong guo jia you », « allez la Chine », en agitant ses petites drapeaux rouges. Le podium est avancé et c’est le grand nageur russe Alexandre Popov qui vient remettre les médailles. Le public reprend en cœur l’hymne national quand le drapeau chinois s’élève dans le Cube. Après un petit tour des champions autour de la piscine, la foule se dissipe en deux temps trois mouvements, alors que les nageurs entrent déjà s’échauffer pour la compétition de natation du soir.

 

 


Je suis contente d’avoir pu sentir de près cette ambiance olympique et d’avoir pu découvrir les installations, qui sont, il faut bien le dire, assez incroyables. J'ai aussi pris beaucoup de photos de ce site ô combien photogénique, dont plusieurs de la fameuse flamme olympique qui brûle devant mes yeux après tant de péripéties (et qui nous a causé tant de problèmes à nous autres Français).

A part cette compétition, la semaine dernière semaine m’a aussi donnée l’occasion de découvrir deux « maisons olympiques ». En effet, la plupart des pays ont ouvert des lieux destinés à recevoir temporairement délégations politiques, journalistes, sportifs et parfois (mais plus rarement) grand public. Je passe une soirée au très décevant Club France, ultra-fermé (il faut être invité), assez petit, assez cheap et assez moche. Par contre la Maison de la Suisse, sise dans une ancienne usine de 4000 m2, au cœur du quartier des galeries d’art, nous offre une soirée open bar champagne, fromage et chocolat suisse que nous ne sommes pas prêts d’oublier. France 0, Suisse 10. Je vous dirai si je découvre d’autres maisons du même acabit (il parait que la maison de la Hollande sponsorisée par Heineken est assez sympa).

En attendant, prochaine étape jeudi soir, avec la demie finale de handball féminin, au gymnase national (donc dans le grand Disneyland olympique), une super soirée mac do en perspective !

Et en cadeau, un beau plongeon des médaillés d'or, "zhong guo jia you" !

Publié dans Chroniques chinoises

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C
oui encore des anecdotes de tes journées et soirées. merci .Profite bien de ces moments que nous nous ne voyons qu' a la tv.bises Catherine
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<br /> <br /> Bonjour Catherine,<br /> <br /> <br /> Merci pour ton petit mot ! J’espère que la famille Aubert se porte bien ?<br /> Bientôt la rentrée pour Hugo et Lucie, courage !<br />  <br /> Bisous à tous<br /> <br /> <br /> <br />